Audience du tribunal administratif de Cergy du 28/01/2019 – Le rapporteur requiert l’annulation totale de la révision du PLU de Gonesse !
Quatre requérants ont demandé l’annulation de la délibération du conseil municipal de Gonesse du 25 septembre 2017 approuvant la révision du Plan Local d’Urbanisme de la commune.
Il s’agit :
- de France Nature Environnement (FNE) avec le CPTG et d’autres Fédérations ou Associations : Val d’Oise Environnement (VOE), France Nature Environnement Ile-de-France, les Amis de la terre Val d’Oise (ATVO), Des terres, pas d’hypers ! (DTPH!), Les Amis de la Confédération paysanne, Mouvement national de lutte pour l’environnement-Réseau homme et nature-Comité départemental (MNLE93), Environnement 93-Union des associations d’environnement de Seine-Saint-Denis, les Amis de la terre France (ATF).
- de la CAPADE d’Aulnay-sous-Bois,
- de M. Jacques Proix, exploitant à Gonesse,
- du centre commercial Aéroville ( qui comprend un supermarché Auchan ! )
A l’audience, le rapporteur public a demandé une annulation totale de la révision du PLU de Gonesse rejoignant ainsi la multiplicité des avis défavorables ou sous réserve que la commune a essuyés. Comme on pouvait le prévoir, il a rappelé à plusieurs reprises les conclusions motivées du Commissaire enquêteur qui avait rendu à l’issue de l’enquête publique le 30 juillet 2017 un rapport particulièrement défavorable à la révision du PLU (voir ICI et pour le rapport complet ICI).
Il lui semble que “la commune de Gonesse illustre parfaitement la volonté qui caractérise hélas bien des communes d’ile-de-France d’un toujours plus d’urbanisation et de développement économique au détriment des zones naturelles et des espaces de biodiversité sans que soient clairement identifiés les impacts bénéfiques de ce développement qui se fera nécessairement au détriment d’autres zones, qui deviendront alors sous-qualifiées, notamment d’autres zones commerciales. La bétonneuse folle s’emballe sans qu’on ait vraiment justifié pourquoi et on ne sait où elle s’arrêtera.”
Le rapporteur a exposé ensuite les motifs dans un long et détaillé exposé d’une heure :
I. Insuffisance alléguée du rapport de présentation et de son évaluation environnementale qui ne permet pas au public de se faire une opinion.
1.1. Notamment, le rapport n’explique pas la rentabilité économique du projet. Avec 800 000 m2 de bureaux alors que la vacance est avérée alentours, avec de nombreux commerces alors que les centres commerciaux voisins déjà nombreux s’inquiètent de la concurrence, il ressort que l’analyse des besoins de ce projet n’est pas étayée. “Le projet du PLU de Gonesse ressemble à un canard sans tête qui poursuit sa route quoi qu’il arrive sans comprendre pourquoi ni savoir pour où, l’essentiel étant d’urbaniser à tous prix un territoire dont on a décidé qu’il devait l’être. “
1.2. Le rapport ne justifie pas le choix du triangle de Gonesse au regard des solutions de substitution raisonnables. Il n’examine pas de possibilités alternatives sérieuses. Aucune solution réelle de substitution n’a été examinée alors que les plaignants mentionnent la friche de PSA.
II. Une erreur manifeste d’appréciation de la loi L.101-2 du code de l’urbanisme.
La loi prévoit un objectif d’équilibre entre développement urbain et préservation des espaces naturels et agricoles et forestiers. L’erreur manifeste découle de la consommation excessive et irréversible de terres agricoles dont la qualité exceptionnelle est reconnue de tous que ne contrebalance pas la création d’emplois qui selon le commissaire enquêteur est par ailleurs largement surestimée. Elle découle aussi de l’absence de prise en compte des équipements dans les communes limitrophes en matière de centres commerciaux, de centres d’affaires et de centres de loisirs. L’erreur manifeste découle également de l’absence de justification économique au projet soulevée par les quatre requérants et aussi eu égard à l’exposition prolongée des futures populations travaillant sur le triangle au bruit des avions.
3- Le PLU n’est pas compatible avec le SDRIF qui demande que 400 ha de terres agricoles soient préservés dans la partie nord du triangle en cas d’urbanisation de sa partie sud.
Le rapport de l’Autorité Environnementale (AE) fait état de seulement 368 ha de terres agricoles préservées. La lisière agricole de 23 ha avancée par la commune ne peut pas être considérée comme à vocation agricole mais plutôt comme une zone transitionnelle qui sera en partie accessible au public pour de l’évènementiel.
Après cela, le rapporteur a écarté la légitimité d’une trentaine d’autres moyens invoqués par les requérants. Il a notamment écarté le motif que la commune aurait du échanger avec les communes voisines.
Maitre Ambroselli, l’avocat du CPTG -et des autres Fédérations et Associations requérantes à nos côtés- a ensuite pris la parole pour rappeler la dimension régionale, voire nationale du projet d’aménagement qui -en l’absence de SCOT- aurait dû pousser la commune à échanger avec ses voisines même . Il a par ailleurs rappelé que selon l’article L101-2 du code de l’urbanisme invoqué par le rapporteur public, les objectifs d’équilibre devraient être évalués au regard des objectifs chiffrés de réduction des gaz à effets de serre affichés par le gouvernement. La ville parle en effet de cet aménagement comme d’un “corridor aéroportuaire” et il est bien évident qu’une partie significative des visiteurs de la ZAC et d’EuropaCity y viendraient en avion. Ce motif, selon Maitre Ambroselli, est tout aussi important que la destruction des terres agricoles, même si son invocation semble n’avoir que peu d’effets juridiques.
En réponse, l’avocat de la commune de Gonesse explique que les insuffisances du rapport ne sont pas juridiques mais politiques. En somme, la commune, pour des raisons politiques, était alors incapable de le compléter, car elle n’avait d’autre possibilité que de localiser le projet sur le triangle. Il explique aussi que la commune a « pris en compte » les avis de l’Autorité Environnementale (AE) et du commissaire enquêteur qui ne sont que consultatifs et n’ont pas de valeur juridique.
A propos des hectares manquant du carré agricole, l’avocat annonce que lorsque la commune a appris le sens des recommandations du rapporteur vendredi dernier (le 25 janvier), il y a eu un grande branle-bas de combat à la Mairie qui a tout de suite fait appel à un géomètre expert, d’ailleurs président de l’ordre national des géomètres, pour faire une nouvelle estimation. Celui-ci a trouvé que le carré contiendrait 307 ha agricoles sur la commune de Gonesse et 188 hectares sur celle de Roissy, soit un minimum de 465 ha après avoir retranché la superficie des routes. L’avocat annonce verser cette nouvelle pièce au dossier, bien que l’instruction soit close depuis le 5 décembre 2018. Il développe ensuite une théorie complexe selon laquelle il y aurait une incompatibilité entre le SDRIF, le PLU et le code de l’urbanisme. Franchement, c’était difficile à suivre. “Je ne suis pas dans le syllogisme total, mais je vous la soumets » conclut l’avocat avant de demander une annulation conditionnelle et différée dans le temps sans annuler le PLU pour permettre à la commune de compléter son rapport afin de se mettre en conformité.
En clôture, la juge a annoncé un jugement avec lecture pour le 22 février 2019.
Pour tout savoir sur la modification du PLU de la ville de Gonesse, voir :
- 18 janvier 2018 : Les arguments retenus par le Commissaire enquêteur pour asseoir son AVIS DÉFAVORABLE à la modification du PLU
- 30 juin 2017 : L’Avis du CPTG sur le PLU de Gonesse remis au Commissaire enquêteur, M. Ronan HEBERT
- 23 août 2017 : Le rapport intégral du Commissaire enquêteur défavorable à la révision du PLU de la ville de Gonesse
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